Les Missions Jésuites

(Du 17 au 19 septembre 2015)


Au XVIIème siècle, la couronne espagnole a confié aux  Jésuites  la mission d’évangéliser le peuple Guarani dont le territoire couvrait environ le Paraguay, les provinces d’Entre Rios, Corrientes et Misiones en Argentine, l’Uruguay et la partie sud du Brésil.

Les Jésuites étaient un ordre dont les objectifs étaient à la fois politique, social et religieux. Ils ont imaginé une société nouvelle : au lieu de soumettre les Guaranis, comme la couronne espagnole le leur demandait, ils se sont appuyés sur leur culture pour créer des cités utopiques qui vivaient en autarcie et se sont affranchis du pouvoir royal. Les Guaranis n’étaient pas considérés comme des sauvages mais comme des citoyens. Ils participaient à la vie de la cité. Tout en les évangélisant, les Jésuites  ont contribué au développement de la culture Guarani et ils se sont mutuellement enrichis. Les Missions se sont développées pendant environ 150 ans. Elles comptèrent jusqu’à 140 000 habitants. Les Missions ont peu à peu constitué une armée pour se défendre des « Bandeirantes » brésiliens qui capturaient les Guaranis pour les vendre comme esclave.

Mais les Missions étaient devenues  trop puissantes et indépendantes aux yeux de la couronne espagnole et c’est ce qui créera leur perte : en 1767, le roi Carlos III signa l’expulsion des  Jésuites des colonies espagnoles  et les Missions périclitèrent, abandonnées par les Guaranis et saccagées lors des guerres qui ont opposées l’Argentine, le Brésil et le Paraguay entre 1816 et 1819.

30 villages ont été construits : 15 en Argentine, 7 au Brésil et 8 au Paraguay. Certaines d’entre elles sont classées au Patrimoine mondial de l’UNESCO.

Chaque mission était construite sur le même modèle.

La place centrale située devant l’église était le centre géographique et social de la mission. Autour de cette place se trouvait l’Église face à l’entrée principale, les ateliers, le cimetière, les habitations des jésuites, la « mairie » et les édifices importants.

Nous avons visité trois "Misiones" argentines : Santa Ana, San Ignacio Mini et San Loreto. Les trois missions argentines que nous avons visité ont adopté un parti pris différent .

Santa Ana


C'est la première Mission que nous avons visité et pour tout dire l'accueil fut tellement désastreux que nous avons failli rebrousser chemin.

Il était 17H quand nous sommes arrivés. La guichetière nous a vu arriver et à peine avons-nous mis les pieds dans l'entrée de la Mission qu'elle nous dit : "Pour la visite c'est 600 pesos". Je lui demande pourquoi car nous sommes deux adultes et deux enfants. J'essaie de discuter et elle me répond que c'est comme cela et pas autrement. Comment vous dire, mon sang n'a fait qu'un tour et nous commençons à rebrousser chemin. Elle me dit que si je suis mécontente, je n'ai qu'à écrire sur le cahier des doléances. Je lui ai demandé le cahier et j'ai dit ce que je pensais de la tarification et de l'accueil.

Finalement nous sommes entrés et avons bénéficié d'une super visite guidée au pas de course car la Mission fermait à 18heures, ce que notre charmante hôtesse avait omis de nous dire.


L'objet de ma colère
L'objet de ma colère

Peu de vestiges à Santa Ana mais des recherches axées sur l’acheminement et le stockage de l’eau.

Les missions disposaient d’un ingénieux système de récupération des eaux de pluie qui s’écoulaient dans un bassin au milieu du jardin : lors des fouilles, les archéologues ont découvert qu’une source alimentait le bassin.

San Ignacio Mini


Choix de la reconstitution et de créer un musée important à San Ignacio avec une chasse systématique de la végétation

L'architecture est constituée d'un mélange de la culture polythéiste baroque des guaranis et celle monothéiste et baroque européen des jésuites.

Quelque chose de  puissant est né du croisement  entre le baroque européen importé par les jésuites et de l’inventivité des guaranis qui voyaient leurs dieux dans les feuillages et qui croyait en une terre sans Mal.

Le baroque guarani est un style inimitable fondé sur le travail du bois et de la pierre. Cet art  que l’on retrouve sur les murs des missions  se caractérise par un excès de formes et de détails qui couvrent tout l’espace libre avec des scènes et des personnages religieux.

Les jésuites utilisèrent l’art comme instrument d’évangélisation. Musique, peinture, sculpture, danse, chant, architecture, théâtre : toutes les expressions artistiques furent utilisées pour faire de l’Evangile un modèle de vie et faire entrer dans l’âme de chaque indigène l’amour de Dieu. C’est pour cela que les thèmes des œuvres étaient toujours liés à la religion.

Mais l’imagination des artistes guaranis dépassa largement cette source d’inspiration et s’affranchit des limites du baroque européen pour créer son propre style fait de contours, de couleurs et de sons différents. Ainsi l’art devient la meilleure expression  d’échange entre les deux cultures  créant un style propre que l’on peut voir encore aujourd’hui au travers des vestiges du passé.

Entrée principale de l'église
Entrée principale de l'église
intérieur de l'église
intérieur de l'église
détail
détail
Porte latérale
Porte latérale

Porte de la sacristie


Chez le peuple guarani, c’est la femme qui décidait ou non d’accepter le prétendant qui se présentait à elle : sans son accord point d’union.  Les jésuites ne se sont pas opposés au maintien de cette tradition mais en revanche ils se sont opposés à la polygamie. Chaque famille vivait dans une habitation personnelle qui ne pouvait qu’être monogame.

Dans les allées latérales se trouvaient les maisons des Guaranis.

Chaque famille avait un morceau de terrain pour assurer sa propre subsistance et devait travailler un morceau de terre pour la communauté : l’église, l’école, le « cotiguazu », lieu où étaient accueillis les veuves et les indigents.

Dans chaque ville tous les corps de métier étaient représentés : ferronnier, charpentier, orfèvre, … la majorité des guaranis cultivaient la terre : maïs, blé, coton et Mate.

Les Guaranis avaient une tradition de culture orale alors que les jésuites avaient une culture de l’écrit. Les jésuites ont appris le guarani, établi des dictionnaires et des grammaires guaranis ce qui a permis de conserver la langue. En parallèle, les guaranis ont appris l’espagnol sans perdre leur langue.

 

Si vous observez la photo, vous verrez que dans cette allée où les colonnes étaient bien alignées, il en manque une : en réalité elle a été parasitée par un Ficus qui a pris racine dessus et qui l’a entièrement recouvert.

La pierre est usée par les milliers de mains qui viennent toucher le cœur de pierre de l’arbre, symbole de longévité et de force : nous n’avons pas échappé à la tradition.


San Loreto


La mission de San Loreto s’étendait sur 75 hectares et était la plus grande des trois. Il y a peu de vestiges car le parti pris est de conserver la végétation : les places et les patios sont donc arborés.

Seules les ruines sont préservées de la végétation.

Le guide nous a fait découvrir les ruines mais également la flore et la faune du parc.

Le travail de restauration a débuté en 2013. Nous voyons une chapelle bien conservée avec des colonnes.

Arbre qui a pris racine sur les ruines
Arbre qui a pris racine sur les ruines

Du fait du manque de chaux pour faire les joints, les pierres étaient assemblées avec un morceau de bois au centre des pierres qui étaient creuses.

Les latrines
Les latrines

Les papillons


Les oiseaux


Autres habitants


La Flore


Nous avons eu trois visites guidées très intéressantes, radicalement différentes et complémentaires.

Il paraît qu’il faut revoir le film Mission mais nous n’en avons pas eu le temps.

 

On a dormi là...

... enfin, dormi c'est beaucoup dire. Jusqu'à 5 heures du matin, on a eu droit au barnum présidentiel. Puis quand ils se sont tus, on a eu droit à un orage terrible. Dommage car le lieu était vraiment sympa.